Les traînées de condensation constituent un important contributeur au réchauffement climatique. Mais que sont-elles, pourquoi et comment les éviter ?
Amelia, pionnière sur le sujet avec son partenaire Thales depuis 2022, s’attaque dès aujourd’hui à la réduction des traînées de condensation. Depuis juin 2024, Amelia réalise des essais d’évitement de traînées de condensation sur certains de ses vols afin d’en réduire leur impact climatique.
Explications avec Adrien Chabot, Directeur du Développement Durable chez Amelia.
Que sont les traînées de condensation, et pourquoi s’y intéresser?
Les traînées de condensation, souvent visibles derrière les avions, sont des nuages artificiels composés de gouttelettes d’eau et de cristaux de glace qui peuvent persister jusqu’à plusieurs heures dans l’atmosphère. Elles se forment lorsque la vapeur d’eau émise par les moteurs des avions se condense dans l’air froid et humide de l’altitude de croisière.
Leur mécanisme de formation, leur durée et leur capacité de réchauffement dépendent de nombreux facteurs, nécessitant l’implication de nombreux scientifiques qui s’intéressent à leur impact potentiel sur le climat.
Bien que leur impact exact soit encore incertain, leur contribution avérée au réchauffement climatique pourrait être aussi importante que celle des autres gaz à effet de serre, augmentant ainsi l’impact du transport aérien sur le réchauffement climatique…
En tant que compagnie aérienne, Amelia travaille dès aujourd’hui à une meilleure compréhension de ces phénomènes afin de pouvoir les intégrer dans un but d’amélioration de nos opérations et de réduction de notre empreinte climatique.
Comment éviter les traînées de condensation ?
La formation des traînées de condensation est généralement observée à des altitudes de croisières élevées, associées à des températures froides et un taux d’humidité important.
Une bonne connaissance des conditions météorologiques permet ainsi d’identifier les zones les plus susceptibles de générer l’apparition de ces phénomènes.
Le plan de vol d’une opération donnée peut alors être modifié afin d’éviter ces zones en les contournant sur le plan vertical, via une modification de l’altitude, ou sur le plan latéral, via une modification de la trajectoire.
La modification idéale peut également être une combinaison de ces deux approches.
Comment le partenariat Amelia / Thales permet de répondre à cet enjeu?
Depuis 2022, Amelia collabore avec Thales sur le développement de la solution Flights Footprint et son intégration dans les opérations de la compagnie.
Cette plateforme, basée sur des modèles scientifiques, permet d’estimer l’impact complet de nos vols sur le réchauffement climatique : elle prend en compte les gaz à effet de serre comme le CO2 ou la vapeur d’eau, et les effets dits “hors-CO2” comme les oxydes d’azotes ou les traînées de condensation.
L’implémentation de cette solution dans les outils de la compagnie permettent également de l’utiliser dès la phase de préparation et de planification des vols.
En quoi consistent les expérimentations réalisées ?
Dans un premier temps, l’intégralité des vols opérés par Amelia ont été analysés afin d’identifier les meilleurs vols candidats, c’est-à-dire les routes les plus sujettes à l’apparition de traînées de condensation.
C’est une opération régulière entre la France et l’Espagne qui a ainsi retenu l’attention des équipes afin de définir la stratégie d’évitement la plus adaptée.
Depuis début juin 2024, c’est ainsi une douzaine de vols qui a été analysée, dès la phase de planification, afin d’ajuster le profil de vol le cas échéant. Avec la participation de nombreux secteurs (opérations, DSI, équipages), nous avons pu mettre en application une politique d’évitement de traînée de condensation sur plusieurs des vols, en concentrant nos efforts sur les vols les plus impactés, à travers une logique d’évitement vertical via un ajustement de l’altitude de croisière.
Les résultats sont extrêmement encourageants, avec un potentiel de réduction de l’impact climatique global – CO2 et non-CO2 – considérable (de 30% à 40%), malgré une légère surconsommation de carburant (3% à 4%) résultant de la modification de la trajectoire.
Ces expérimentations sont d’autant plus importantes qu’il s’agit certainement des premières réalisées en Europe dans un cadre opérationnel.
La mise en place de ces expérimentations est notamment soutenue par la participation du CORAC et de la DGAC dans le cadre France 2030.
Quelles sont les prochaines étapes ?
L’évitement des traînées de condensation est une solution rapide et disponible immédiatement pour réduire significativement l’impact de nos opérations sur le climat.
Les expérimentations vont continuer dans les mois et les années à venir. L’amélioration des modèles scientifiques et l’intégration automatisée des recommandations dans les opérations aériennes va permettre une systématisation progressive des essais afin de constituer une base de connaissances solide. Le perfectionnement des modèles permettra également une meilleure optimisation des trajectoires de contournement des zones à éviter et, en conséquence, une augmentation des vols traités.
Au-delà des aspects techniques et scientifiques, ces expérimentations permettent de sensibiliser et former le personnel Amelia comme nos clients aux conséquences de ces effets hors-CO2.
Cette approche pionnière nous permet également de nous préparer dès aujourd’hui à répondre aux exigences européennes en termes de suivi et de déclaration des émissions hors-CO2 qui devraient entrer en vigueur dès le 1er janvier 2025.